29 nov. 2009

Un long fleuve tranquille


C'est la tête pleine de fantastiques souvenirs de la Colombie qu'on décide de se lancer à la découverte de l´Amazonie brésilienne. Un saut d'avion survolant une région peu recommandable nous dépose au port de Leticia, à la frontière colombo-peruvo-brésilienne. De là, on embarque pour 4 jours et 3 nuits jusqu'à Manaus, au cœur de l´Amazonie. Le bateau est construit sur 3 étages et peut contenir jusqu'à 250 passagers. Dans cette région où il existe peu de routes praticables, les fleuves font office de route et les bateaux de bus.
Munis de nos hamacs tout neuf, on prend soin d´arriver dans les premiers afin de s'installer loin du vacarme du moteur. A chaque arrêt, la concentration de hamacs et de sacs se fait plus dense. Leur enchevêtrement fini par dessiner une gigantesque toile où les corps s´entremêlent. On comprend rapidement les astuces pour conserver un minimum d'espace vital et éviter de se retrouver avec un voisin un peu trop envahissant (placer son hamac en hauteur, s'étirer de tout son long).
Au début, on a quelques craintes pour nos affaires, surtout la nuit pendant les nombreuses escales. D'autant plus que le contenu de nos sacs a été minutieusement étalé aux yeux de tous par un contrôle de police la 1ère nuit (n'oublions pas qu'on vient de Colombie...).
Puis au fil des jours, la confiance et la routine s'installent. On fait peu à peu connaissance avec nos voisins de hamacs: d'abord les touristes hispanophones - Xavi, Marco, Talia, les 2 Juan, Julio et Cecilia, puis les locaux. Les journées défilent au rythme des repas et des siestes, entre lesquels on prend le temps de mater, lézarder, bouquiner, jouer aux dominos ou aux cartes.
Les eaux boueuses du fleuve, s'écoulant calmement le long d'une jungle épaisse et mystérieuse, sont parfois pimentées de dauphins ou d'un bateau en sens inverse. On fini par s'habituer à la monotonie du paysage, au ronronnement incessant du moteur, au cd de musique forro passé inlassablement en boucle dans des baffles grésillantes, aux canettes de bière jetées par dessus bord.
Certaines escales sont l'occasion de se dégourdir les jambes, d'acheter des fruits (encore des saveurs nouvelles). Et quand le bateau reprend sa marche, une brise légère soulage de la chaleur moite et des moustiques.
Après avoir navigué plusieurs jours  sur ce fleuve démesurément grand délimité par des berges quasi vierges, la découverte de l'énorme ville industrielle qu'est Manaus n'en est que plus surprenante. Le plus saugrenu étant son superbe théatre. Une fois de plus, on constate un grand déséquilibre entre ce quartier opulent et les rues insalubres du port et du marché où des familles entières squattent les épaves de bateaux échoués.
A l'approche du port de Manaus, un phénomène étrange se produit: la rencontre de 2 fleuves, l'un couleur café noir et l'autre café au lait, dont la frontière mouvante met plusieurs kms à se dissiper. On se baigne d'ailleurs dans les eaux noires du rio Negro; son immensité et la plage de sable brulant donnant l'illusion de bord de mer.

Puis on repart pour 5 jours de navigation direction Porto Velho, proche de la frontière bolivienne, accompagnés des chiliens rencontrés pendant la "croisière" précédente. Le bateau, plus petit et plus rustique, longe les rives à contre-courant du rio Madiera. On réalise que le 1er bateau était presque luxueux en comparaison, mais on n'est pas au bout de nos peines: on doit changer d'embarcation à mi chemin pour une autre encore plus étroite et usée. Bertrand se cogne constamment la tête et nettoie les toiles d'araignée du plafond. Le voyage commence à se faire long et ennuyeux. Bref, on a atteint nos limites d'adaptabilité; il est temps qu'on arrive. Mais ces 2000 km parcourus au cœur de l'Amazonie resteront une expérience inoubliable!

Les photos / le diapo de l'Amazonie.














19 nov. 2009

Colombia es pasión

La Colombie est surtout connue pour Ingrid Betancourt, les FARCs et Pablo Escobar. Ce pays est pourtant bien plus que ca.
Les guerillas, les paramilitaires, les déplacés sont en effet de réels problèmes, principalement alimentés par le traffic de drogue et l'extrême inégalité de répartition des richesses. Dans les zones reculées, les plus miséreux n'ont souvent pas d'autres alternatives de survie que les armes ou la coca. Comme ce gamin enfui de la guerilla et recueilli par la femme de ménage d'Alejandro. Une des questions que pose Barcelombia dans ses interviews, "La Colombie est elle un pays sans guerre?", est généralement suivie d'une réponse enflammée, car chaque famille a vécu au moins une tragédie. Ce qui explique d'ailleurs peut-être leur si intense ferveur religieuse. Le président Uribe, en sécurisant certaines zones du pays par d'obscures méthodes très musclées, a réussi à se faire aduler du peuple qui le surnomme "el mesiah" et est sur le point d'être réélu pour un 3ème mandat, mais à quel prix ?

Nous avons donc circulé dans ces fameuses zones sécurisées, qui s'avèrent être plus touristiques que ce qu'on imaginait. Et on y est resté beaucoup plus longtemps que prévu, car on ne peut que s'attacher à ce pays passionnant, d'une grande variété de cultures et de paysages, et à ces gens chaleureux, ouverts, débordants d'hospitalité, d'autant plus attentionnés qu'ils souffrent de la mauvaise réputation de leur pays.


17 nov. 2009

Don Umberto y Señora Cristal, carrera 80A, Bogota


Bogota est un quadrillage de rues plus ou moins régulier construit sur une zone marécageuse qui s'étend à perte de vue. La vieille ville coloniale, devenue centre-ville, n'a rien de central. Elle est calée au pied des montagnes de Montserrate et Guadalupe à l'extremité est de la ville. Malgré un système de restriction de circulation, pico y placa, les rues restent saturées de vehicules et de pollution. Il y a bien un projet de métro, mais pas pour tout de suite. En attendant, le ciclo ruta des dimanches, où la circulation est coupée sur certains axes, n'en est que plus appréciable. Les 2600m d'altitude assurent des températures assez fraîches toute l'année. Il n'y a pas vraiment de saison: quand il pleut, c'est l'hiver; quand il fait beau, c'est l'été.

Nous avons eu la chance d'être immergé au sein de la vie d'une famille bogotane, chez Lilian, la grand-mère de Karool. On ne s'attendait pas à un accueil si chaleureux, sans reserve. Ils nous ont ouverts leur porte, nous ont adoptés en toute simplicité et ont même rivalisé d'attention à notre égard. Nous ayant rebaptisé Señora Cristal y Don Umberto, l'énergique Lilian nous a concocté toute sorte de plats typiques plus savoureux les uns que les autres, accompagnés de délicieux jus de fruits aux saveurs inconnus: lulo, feijoa, guanabana...

Comme la plupart des colombiens, elle est une fervente catholique, qui ne rate jamais son programme télé de prières et a décoré chaque pièce de peintures, statuettes et autres bougies à la gloire de Dieu. Cette maison aura été notre point d'attache pendant notre séjour en Colombie, un repère précieux en ce début de voyage après avoir laché toutes les amarres en France.
Encore un grand merci a Lilian, Unyse, Leonardo, Henry, Parra, Angelo, Cindy, Ines, Leidi, Lilian y Oscar !

Alejandro, qu'on avait rencontré à la Guajira, se chargera de nous faire découvrir les bouillonnantes nuits bogotanes. C'est comme ça qu'un soir dans un bar, on se retrouve à discuter cinéma avec Quique, l'acteur de La sangre y la lluvia, un film noir qu'on avait vu la veille où il interprète un chauffeur de taxi. C'est d'ailleurs lui qui nous reconduira chez Alejandro après avoir erré dans les rues de Bogota à la recherche d'une fête qu'on ne trouvera jamais.

Les photos / le diapo de Bogota.




2 nov. 2009

Palmiers de cire et café bio







On traverse la région verte et humide de l'Eje cafetero, pour s'y arrêter en plein coeur, au village de Salento, porte d'entrée de la superbe vallée de Cocora. Ses paysages si uniques parsemés de palmiers de cire se dressant majesteusement de toute leur hauteur (jusqu'à 60m) dans le creux de cette vallée, vallent à eux seuls le détour.



De retour à Salento, on part à la recherche du magasin de café de Pedro, un ami d'Ophélie. Il nous acceuille ainsi autour d'une tasse de café, dans sa petite boutique à l'écart de la rue commerçante, où trône une antique cafetière italienne.

Il nous invite finalement à passer quelques jours chez lui dans sa finca baptisée Sachamama (terre mère, en langue quechua). C'est comme ça qu'on atterri chez une famille de passionnés du café et d'agriculture bio: le bouilonnant Pedro et la paisible Marjorie, dans leur maison en bois éclairé aux bougies où chaque chose a son utilité.
Contrairement à la grande majorité des exploitants de café de la région, ils utilisent des techniques ancestrales qui ne nécessitent aucun apport chimique. Comme ils nous l'expliquent, le café est un arbuste des sous-bois, naturellement protegé et nourri par la vegetation environnante. En voulant en faire une monoculture intensive, il devient vulnérable, ce qui oblige à utiliser des pesticides et autres apports chimiques.  Ainsi, leurs voisins défrichent et arrachent les arbres, alors qu'ils essaient de reforester leur terrain. Ils ont fait le choix d'une production réduite mais de qualité et respectueuse de l'environnement et font d'ailleurs parti du reseau Terra Madre, une organisation prônant le "slow food".

Dès les premiers échanges, nous sommes séduit par leur détermination, leur assurance d'être sur le bon chemin bien qu'à contre-courant et leur mode de vie proche de la nature. Nous réalisons simplement qu'il est possible de vivre confortablement avec peu.

Entre 2 explications sur le processus du café, ils nous font découvrir des richesse cachées de la nature : des propriétés de plantes, au savon de terre et détergent naturel (EM ou Micro-organisme Efficace).



 Les photos / le diapo de Cocora et Sachamama.